Compenser, à quoi ça sert ?
C’est une question que l’on nous a beaucoup posée pendant la phase de construction d’Inuk : à quoi cela sert de compenser ? Est-ce que ça n’est pas un réflexe de paresseux qui refuse de changer ses habitudes ?
Par Thaïs Drozdowski, CEO et co-fondatrice d'Inuk
Inuk est une entreprise française, spécialiste de la contribution carbone. Inuk a développé en 2018 la première technologie de traçabilité appliquée au crédits carbone. Nous proposons aux entreprises des crédits carbone made in Europe parmi les plus fiables du marché. Nos équipes accompagnent aussi au quotidien des entreprises de toute taille dans leur transition bas-carbone.
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1. Atteindre la neutralité carbone
Pour bien comprendre la nécessité de la compensation carbone, il faut revenir à ses origines.
D'abord, la compensation a un objectif : la neutralité carbone.
Une activité neutre, c’est une activité qui ne génère aucune émission de gaz à effet de serre. On peut devenir neutre de deux manières : en réduisant au maximum ses émissions, et en compensant celles qui ne peuvent pas être évitées. En effet, une activité économique qui ne génère pas de carbone, ça n’existe pas. Que ce soit pour fabriquer un vélo ou un yaourt, faire rouler un train, recycler un jouet ou même envoyer un e-mail, toutes nos activités ont une empreinte carbone, dont une partie qui est incompressible. Réduire son empreinte, c’est indispensable, mais ça ne suffit pas. C’est pour cela qu’a été mis au point le principe de la compensation carbone.
2. Le “droit à polluer”
Le mécanisme s’est d’abord et surtout développé dans le monde de l’entreprise. En 1997, le protocole de Kyoto est signé lors de la COP3 : cet accord international, entré en vigueur en 2005, vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 5 % par rapport au niveau de 1990 entre 2008 et 2012. (Pour être complets, cet objectif a été largement dépassé avec une réduction supérieure à 20%, et nous sommes jusqu’à 2020 dans la seconde phase du protocole de Kyoto.) Ce protocole instaure aussi des mécanismes de flexibilité, dont les permis d’émission : un système qui permet de vendre ou d’acheter des droits à émettre des gaz à effet de serre entre pays, mais aussi entre entreprises.
“Dans les faits, cela consiste à mettre fin à la gratuité de l’émission de ces gaz, qui est désormais réglée par un système de quotas par tonne, ou ‘permis de polluer’, que l’on achète, selon les lois de l’offre et de la demande”,
résume un article du Monde de 2006. En somme, le quota de pollution est limité, et les entreprises s’organisent entre elles, sur un marché du carbone, pour ne pas collectivement le dépasser.
3. La fabrication des crédits carbone
À cette logique va s’ajouter celle de la compensation — rappelons que son objectif est la neutralité et que pour l’atteindre, réduire les émissions ne suffit pas. Donc, sur le marché du carbone, on peut acheter son droit d’émission à une entité qui ne l’utilise pas, mais aussi en finançant l’évitement d’émissions de gaz à effet de serre.
Par exemple, une entreprise plante des arbres qui séquestrent une tonne de carbone : cette tonne de carbone qui n’a pas été émise dans l’atmosphère devient un “crédit”, que je peux acheter pour avoir le droit d’émettre, de mon côté, une tonne de carbone. En somme, les arbres compensent ma pollution et me permettent d’être neutre.
Autre exemple : une entreprise d’énergie solaire produit une quantité d’électricité qui, si elle avait été produite autrement, aurait généré une tonne de carbone. Le principe est alors le même : ces gaz non émis deviennent un crédit que je peux acquérir si je ne peux absolument pas éviter, dans mon activité, de générer ma tonne de carbone.
Alors, où est le problème ?
Les crédits carbone, c’est donc ce qu’on a trouvé de mieux pour limiter les émissions de gaz à effet de serre. Pour autant, ils ne sont pas très populaires : on entend plus parler de fraude et de spéculation que des succès du mécanisme. Et pour cause ! Deux problèmes majeurs nuisent au fonctionnement général du principe de compensation :
  • L’accès à la certification est chère : pour vendre des crédits carbone inutilisés, il faut les faire certifier par l’ONU ou un autre organisme compétent. Cette contrainte suppose des frais d’audit exorbitants qui empêchent le plus grand nombre, et en premier lieu les PME, d’accéder à ce marché ;
  • La certification n’est pas toujours gage de qualité : les audits ne peuvent pas être reconduits régulièrement (notamment à cause de leur prix). Résultat, les crédits carbone peuvent être alloués à une entreprise sur la base de données vieilles de plusieurs années. Et si la performance de l’entreprise a changé ? Et si ses panneaux solaires ont été mal entretenus et ont cessé de fonctionner ? Aucun moyen fiable de le savoir.
Ces raisons, les barrières à l’entrée et le manque de transparence, font du marché des crédits carbone un “club de multinationales” auquel on accorde peu volontiers notre confiance. Et cela se traduit très concrètement sur le marché, avec des prix du carbone le plus souvent extrêmement bas et pas du tout alignés avec son coût économique et environnemental réel.
Et chez Inuk, ça donne quoi ?
Notre idée, c’est de rendre ce mécanisme de compensation accessible à tout le monde pour tous les petits gestes du quotidien. Parce qu’il n’est parfois tout simplement pas possible de ne pas émettre de gaz à effet de serre dans la vie de tous les jours. Il est difficile — voire impossible — aujourd’hui de se passer à 100% de la voiture et de l’avion, de consommer uniquement bio et local. Certains n’ont même pas accès à des fournisseurs d’électricité verte.
Vous l’avez compris, l’exemple de l’énergie solaire donné plus haut, c’est le nôtre. Pour chaque gramme de carbone que vous émettez, on produit grâce à nos partenaires solaires de l’énergie propre, qui évite qu’un autre gramme de carbone ne soit émis en produisant de l’énergie non renouvelable. Quand vous choisissez de compenser dans l’app Inuk, vous financez donc directement la production d’énergie solaire.
Et pour éviter les écueils du marché actuel des crédits carbone, on a construit cette solution de compensation sur la blockchain. La blockchain, “chaîne de blocs” en français, est une technologie de stockage et de transmission d’informations complètement décentralisée, sans organe de contrôle.
“Techniquement, il s’agit d’une base de données distribuée dont les informations, envoyées par les utilisateurs, sont vérifiées et groupées à intervalles de temps réguliers en blocs, liés et sécurisés grâce à l’utilisation de la cryptographie, et formant ainsi une chaîne”,
explique très bien Wikipedia. Appliquée aux crédits carbone, cette technologie agit donc comme un auditeur préalable à leur création. Grâce à elle, l’audit des entreprises fabricantes d’énergie solaire se fait en continu, et pas une fois de temps en temps. Tous les crédits émis correspondent réellement à du carbone évité dans l’atmosphère : c’est infalsifiable. Cette approche permet une transparence et donc une confiance que ne peuvent garantir les audits traditionnels. Autre avantage : elle réduit drastiquement les coûts et ouvre ainsi le marché des crédits carbone aux petits producteurs d’énergie renouvelable, qui en étaient auparavant exclus.
On le sait, cette partie-là est un peu technique. On y consacrera très bientôt un article entier !
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